par @FrancoisChe
Kameha : quand la crème du rap alternatif posait sur les instrus de Dragon Ball

Alors que sort en salles Dragon Ball Super Broly, retour sur la genèse d'un projet méconnu piloté par Jérôme Thomas aka Vgtah, publié il y a tout juste 10 ans.
Vers la fin des années 2000, le réalisateur producteur Jérôme Thomas aka Vgtah, auteur récemment du super documentaire sur le muralisme baptisé Sky's The Limit, invite plusieurs figures du rap français « alternatif » à poser sur les musiques de Dragon Ball. On retrouve ainsi dans le tracklisting Nikkfurie (La Caution), Cyanure (ATK), Frer 200, Rachid Wallas, DJ Gero… ou encore des vieux routiers du circuit américain comme Jamalski et D.V. Alias Khrist (à qui l'ont doit quelques feat. avec De La Soul et Diam's). 10 ans après, ce concept album passé sous le radar à l'époque, mérite un coup de projecteur au moment où Dragon Ball Super Broly est projeté sur grand écran, ne serait-ce que pour sa proposition singulière.
L'album Kameha, tribute to Dragon Ball, « c'est l'aboutissement de 10 ans de sampling de ce manga légendaire, se souvient Jérôme Thomas, fan de la série créée par Akira Toriyama, en découvrant la musique de Shunsuke Kikuchi (compositeur des musiques de DB, qui a aussi travaillé sur Albator — NDLR), j'ai pété les plombs ! C'est une sorte de Quincy Jones japonais. Son œuvre, c'est de l'opéra urbain, avec de la dramaturgie, des cordes, des cuivres… Cet hommage lui est dédié ». En 2009, après avoir samplé plus de 50 instrus de Dragon Ball, il propose à des MCs qui n'ont pas froid aux yeux de rapper dessus, avec une liberté totale sur les textes. Thomas n'a pas trop besoin de forcer pour les convaincre, Dragon Ball étant le totem culturel des gamins qui ont grandi dans les années 1990, élevés aux dessins animés du Club Dorothée.
« Le rap n'est pas très populaire chez les mangakas »
Les enregistrements se font en grande partie dans le home studio de Vgtah, qui produit la quasi-intégralité des pistes, épaulé par Katre er DJ Laize. Au final, le concept album publié en novembre 2009 est relativement homogène sur le plan artistique, ce qui est une prouesse vu la diversité des flows et des univers en présence. Certains tracks sont clairement au dessus du lot comme Fast Life, avec Cyanure, Jamalski et Syclone ou Super Guerre avec Nikkfurie. Au total, 5 morceaux seront clipés (voir en bas de page).
Pourtant, Kameha ne trouvera pas réellement son public. Il faut se souvenir qu'en 2009, les plateformes de streaming étaient encore balbutiantes et l'industrie musicale se cherchait un nouveau modèle économique. Un contexte pas facile pour défendre ce type de projet indépendant et décalé, soutenu par le label Folistar. « J'ai fait de la promo partout où je pouvais, avec les moyens du bord, notamment sur les forums et les sites de fans de Dragon Ball, mais je crois que le rap n'est pas très populaire chez les mangakas (rires) », insiste Jérôme Thomas,. Quand on voit comment les aventures de Son Goku influencent l'imaginaire du rap français actuellement — de PNL à Sadek, de Demi Portion à Alkpote — on se dit que ce projet aurait peut-être une toute autre résonance s'il était publié de nos jours.
Le lien pour écouter l'album en entier.
Ce soir, Street Tease Magazine publiera sur sa page Facebook un documentaire inédit sur les coulisses du projet Kameha.
Les autres clips : Vgtah, Repères ; DV Khryst feat. Kwamé, A Part of Me ; Neobled, Parabellum ; Syclone (Dyslexie), Super Héro.
Texte de François Chevalier